Dix jours. Dix jours ont passé et nous ne présentons toujours aucun symptôme. La journée commence sur cette pensée positive. On se rapproche de l’échéance des quatorze jours pendant lesquels on est censés déclarer la maladie si on a été infecté, et rien. En y repensant, déjà au départ, il nous semblait peu probable d’avoir été infectés, allez savoir pourquoi !
Depuis le début de cette quarantaine forcée, on est relativement rassurés en ce qui concerne nos enfants : mon fils Xavier est en congés, il profite de sa progéniture, le fils aîné d’Annie télétravaille depuis le domicile de son amie. La seule ombre au tableau, c’est son fils cadet. Il est obligé d’aller bosser tous les jours : son patron, qui ne fait pas confiance à ses employés, a interdit le télétravail et impose à tous de venir au bureau. Résultat : beaucoup d’absences maladie, et, d’après lui, un cas de coronavirus avéré. Si, d’aventure, il devait être contaminé, sûrement que nous porterions plainte contre ce chef d’entreprise inconscient. Surtout que, pour bosser, il n’a besoin que d’un téléphone et d’une connection internet.
Nous sommes jeudi. Habituellement, le jeudi matin, je prends mon cahier d’écriture et je vais en ville, toujours dans la même brasserie, boire un cappuccino en écrivant quelques pages, installé au soleil. Aujourd’hui ça me manque mais probablement que, même en temps normal, je n’y serais pas allé : j’ai pris trop de retard dans les corrections à incorporer dans le tapuscrit de mon dernier roman. Ceci étant, à midi je suis bien obligé d’avouer que je n’ai pas avancé d’un pouce sur cette tâche.
Il y a sept ou huit mois, avant de partir en Polynésie, nous avions acheté, pour le volet roulant qui protège l’accès à la maison depuis la terrasse, un interrupteur « intelligent », commandable à distance par internet. Je n’avais pas trouvé le temps de l’installer. Cet après-midi je décide de m’y mettre. Quand j’ouvre la boite de ce produit américain, j’y trouve un superbe label marqué « made in China ». En une heure à peine, c’est monté, il n’y a plus qu’à le mettre en route. La notice traduite du chinois en anglais et de l’anglais en français par des machines automatiques, est truffée de phrases totalement incompréhensibles (on dirait du chinois…) heureusement que les illustrations sont claires parce que je n’aurais pas su que faire en lisant « flasher le noir bouton ». Mais bon, avec beaucoup de bonne volonté j’y suis parvenu. Ça fonctionne et c’est relié à notre auxiliaire zélée, j’ai nommé Alexa, le bras armé de Jeff Bezos. Seul problème, Alexa ne comprend pas les mots « ouvre » ni « ferme ». Il faut lui dire « Alexa, allume le volet ! » ; et elle consent à l’ouvrir. Ou alors, le soir, « Alexa, éteins le volet ! » Il est con, ce Jeff Bezos, je comprends que sa femme ait divorcé.